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PLAN D’ACTION POUR LA PROMOTION DE LA LOI CRIMINALISANT L’ESCLAVAGE 2013-2014

ven, 02/14/2014 - 08:08

PLAN D’ACTION POUR LA PROMOTION DE LA LOI CRIMINALISANT L’ESCLAVAGE 2013-2014

I. Contexte géographique et social de la Mauritanie

La république islamique de Mauritanie indépendante de la France depuis 1960, s’étend sur une surface de plus de 1 million de kilomètres carrés. Sa population s’élève à 2,9 millions de personnes. En raison des conditions désertiques qui caractérisent la majorité du pays, la population se concentre fondamentalement sur la cote- Nouakchott, Nouadhibou- et dans la vallée du fleuve qui sert de frontière naturelle entre la Mauritanie et le Sénégal. La Mauritanie est un pays

charnière entre l’Afrique du nord et l’Afrique subsaharienne. Près de 2/3 de la population relèvent de la culture arabe avec des origines arabo –berbères, le tiers restant est d’origine négro-africaine (peul, wolof, soninké). Sur le total de la population de culture arabo -berbères , près de la moitié est composée des esclaves et de Harratines ( anciens esclaves affranchis).

 

II. Contexte géopolitique

Avant la période du 3 Août 2005, la Mauritanie baignait dans une atmosphère politique caractérisée sur fond de crises politiques multidimensionnelles larvées.  A telle enseigne que l’apposition était opprimée et les dissolutions itératives des partis politiques étaient monnaie courante. Le Tout reposant sur un  exercice solitaire du pourvoir, n’offrant aucune perspective d’alternance ; ni même ne serait-ce que la moindre perspective de dialogue. Ce qui, naturellement, a conduit à une succession de tentatives  de coup d’Etat, dont un  particulièrement  sanglant, en l’occurrence celui  de Juin 2003 , sans oublier le tout premier coup de force qui a éjecté  du pouvoir  Maître Moctar Ould Daddah, père de l’indépendance.

Les forces armées et de sécurité nationale  ont pris la ferme décision d’en découdre définitivement avec le régime de Ould Taya,  à l’effet de prévenir les dérives susceptibles de s’avérer  incontrôlables et aux issues incertaines, mettant ainsi sur pied et à juste titre le Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie (CMJD) qui a tout  de suite déclaré sa volonté d’asseoir une démocratie réelle pendant une période de transition à court terme n’excédant pas deux ans.

Mieux le CMDJ va décréter l’inéligibilité de son président, de ses membres ainsi que du Premier Ministre et  tous les  membres de son gouvernement. Une conférence des forces vives (journées nationales de concertation ) à laquelle ont pris effectivement part six cents représentants de toutes les sensibilités et sphères politiques de la Mauritanie s’est accouchée d’un calendrier électoral désormais fixé, sur des bases fiables devant aboutir à l’organisation de scrutins fiables pour une alternance démocratique.

C’est dans ce contexte historico –géopolitique que sont intervenus l’ensemble des élections successives dont l’apothéose se trouve être sans  conteste, l’élection du 11 Mars 2007.

Le processus qui s’est déroulé dans un climat de sérénité  a vu la forte implication des femmes. En effet les autorités de la transition ont innové en adoptant des mesures incitatives en la matière. Le quota de 20% des postes éligibles réservés aux femmes sur les listes des candidats aux élections législatives et municipales , constitue une avancée remarquable dans ce contexte Mauritanien caractérisé par une participation politique traditionnellement faible des harratines .

Dans un premier temps, de nombreux partis politiques se sont montrés réticents dans l’application stricte de ces quotas. Le quota de 20% de sièges réservés aux femmes a été effectivement atteint dès le premier tour des élections. Parmi les 43 sièges à l’Assemblée nationale attribués au premier tour, neuf d’entre eux, soit 21% étaient occupés par des harratines. Concernant les élections municipales, les femmes ont remporté 30,3% des sièges dans les conseils municipaux, ce qui dépasse les attentes. A l’issue du deuxième tour , les femmes ont rempoté 19% des sièges de l’Assemblée nationale. En revanche, aucune femme ne s’est présentée comme candidate à l’élection présidentielle. Les femmes ont également participé massivement aux élections en tant qu’électrice aussi bien pour les élections législatives et municipales que pour l’élection présidentielle. Par contre, la présence des esclaves  et des harratines, est restée faible tant dans les instances chargées de l’organisation et de la supervision des élections (bureaux de vote, commission électorales) qu’au sein des instances dirigeantes des partis politiques .Un seul parti politique ( APP) est dirigé par un harratine .

Le 6Août 2008 un coup dirigé par une junte militaire a déposé  le pouvoir élu démocratiquement par le peuple mauritaniens et cautionner par la communauté internationale, faisant la chasse aux sorcières pour tout celui qui est contre la prise de pouvoir par la force.

Toutes les réalisations durant le règne du pouvoir sont mises à l’eau, l’accès aux médias publics, la liberté de manifestation,  la corruption et la discrimination sur toutes ses formes.  L’achat des consciences des paisibles citoyens pour les contraindre sur la base de la tribu et de la région à applaudir la junte. Une campagne de règlement de compte a été lancée par le général envers tout ce qui peut se dresser contre lui parmi les dirigeants politiques et la société civile mauritanienne.

III. Contexte économique

L’économie  mauritanienne a enregistré une croissance du PIB réel de l’ordre de 6,2% en 2004 et une moyenne de 4,6% par an sur la période 2001 – 2004.Toutefois selon les données provisoires révisées ces dernières années ont été caractérisées par une détérioration de la gestion macro économique , résultant en particulier , des importants dérapages budgétaires et monétaires ayant compromis la stabilité économique et la réalisation des objectifs de développement du pays .Ainsi au début de l’année 2004 , des problèmes de fiabilité et de transmission des données  sont apparues et ont gravement affecté les relations de la Mauritanie avec ses partenaires au développement avec notamment l’arrêt de la facilité pour la réduction de la pauvreté et la croissance du FMI ,la suspension de la préparation de l’opération budgétaire relatif au crédit d’appui à la stratégie de réduction de la pauvreté de la Banque Mondiale (B.M). A la fin de l’année 2005, le gouvernement de transition a décidé de résoudre ces questions en engageant une procédure de révision  des données aux services du Fonds Monétaire International (FMI) sur  une période de plus de dix ans (1992-2004)et de prendre toute les mesures correctives nécessaires pour rétablir la transparence des données et mettre en œuvre des politiques publiques visant à   assurer un développement durable et une utilisation optimale des ressources de l’exploitation pétrolière.

IV. CONTEXTE SPECIFIQUE

Dans son évolution, le pays a connu un certain nombre de comportements culturels et traditionnels qui ont eu à perpétuer des tares héritées du passé. Au premier de ces comportements l’esclavage occupe une place de choix. En effet des hommes et des femmes durant des siècles ont été  soumis à une autorité tyrannique marquée par l’asservissement, et la servitude.

Et pourtant la constitution Mauritanienne prône l’égalité des citoyens sans aucune discrimination. Malgré ce principe fondamental,  des citoyens ont continué a entretenir ce comportement.  C’est dans ce contexte qu’est intervenu pour la première fois l’Ordonnance N°81.234 de Novembre 1981abolissant l’esclavage. Cependant, la mise en œuvre concrète des dispositions de cette loi s’est heurtée au manque de stratégie adéquate de la part des pouvoirs publics, la persistance de vielles pratiques et à l’analphabétisme. Ainsi , les rares mesures prises dans le cafre de l’application de cette ordonnance avaient été portés essentiellement sur l’indemnisation des anciens maîtres d’esclaves.

Plus d’un quart de ciel après cette ordonnance on se rend compte que l ‘esclavage n’a pas été éradiqué et que les objectifs de l’Ordonnance n’ont pas été atteints.  Le manque de définition de l’acte a conduit  à une frange du pays d’entretenir la  confusion entre le discours sur la servitude et sa justification religieuse. Aussi, les moindres plaintes et démarches entreprises par les organisations de défense des droits humains pour dénoncer les faits relatifs à cette pratique inhumaine, n’ont jamais réussi à provoquer la moindre réaction des pouvoirs publics contre les fautifs. Cette situation a été observée surtout pendant les 21 ans de règne de Ould taya.

Il convient de souligner que c’est au cous du processus de transition notamment pendant la période électorale que plusieurs candidats dont le président actuel s’étaient  engagés, dès leur prise de pouvoir, de créer les conditions susceptibles d’éradiquer le phénomène. C’est dans ce contexte particulier que s’inscrit l’adoption par l’assemblée nationale de loi criminalisant l’esclavage.

En adoptant cette loi ,notre pays s’inscrit aujourd’hui dans un tournant décisif par lequel  « il vise l’élimination de toutes les tares héritées du passé(…) et les conditions favorisant le progrès en incriminant et en réprimant les pratiques qui lui sont liés… »

Du coté des organisations de défense des droits humains, ( qui ont eu sous l’égide de SOS/ESCLAVES a apporté des amendements au projet de loi) on se félicite de loi « qui représente une avancée  historique dans la lutte contre l’esclavage ».

Concernant les articles de la loi votée à l’assemblée nationale, les organisations de défense de droits humains se réjouissent de la référence faite à l’islam dans l’article 1 (amendé) qui permettra à tous les mauritaniens de comprendre que l’esclavage est contraire à la Charia islamique. Ainsi, cette référence met fin aux interprétations erronées de la Charia.

D’une manière générale par rapport à la loi les organisations de défense de droits humains déplore que :

ü La distinction entre crime et délits d’esclavage ait été maintenue,

ü La loi ne tienne pas compte des pratiques  analogues à l’esclavage,

ü La qualification de prétendu esclave n’ait pas totalement disparu de la loi,

ü La réparation ne correspond pas au préjudice subit par les victimes de l’esclavage

ü Les Organisations de droit de l’homme ne peuvent pas se constituer partie civile

ü L’article 13 n’ait pas été amendé comme suit :

« Quiconque profère en public des propos injurieux envers une personne esclave ou victime de pratiques analogues à l’esclavage du fait de son statut ou de sa condition est puni d’un emprisonnement de 11 jours à 1 mois et d’une amende de 5.000UM à 100.000UM ou une de ces deux peines. »

Après l’adoption de la loi , il reste aujourd’hui les décrets d’application et elle demeure sur les papiers. Pour les organisations de défense de droits humains, les décrets d’application doivent entre autres instaurer :

· Une commission d’enquête indépendante chargée d’enquêter sur l’ampleur des pratiques esclavagistes en Mauritanie,

· Une structure  gouvernementale chargée de coordonner la lutte pour l’éradication de l’esclavage

· Des centres d’insertion et de réinsertion sociale et économique pour les victimes

· Des foyers d’accueil

· Des campagnes de sensibilisation.

· Les organisations de lutte contre l’esclavage ne sont pas impliquées dans la gestion de l’agence Tadamoun pour l’éradication des séquelles de l’esclavage

L’autre défi qui interpelle les autorités, est de parvenir, en partenariat avec les organisations de défense de droits humains, à élaborer un projet de loi pour lutter contre toutes les formes de discrimination raciale.

1. Objectif global

Sensibiliser et promouvoir la loi criminalisant l’esclavage et consolidation de l’unité nationale

2. Objectifs spécifiques

Ø Assurer la sensibilisation des populations et les leaders d’opinion (imams et personnalités influentes) sur l’esclavage et la loi

Ø Assurer l’accompagnement et l’orientation des victimes à travers l’ouverture de centre d’accueil en plus de celui de l’AFCF pour les victimes de l’esclavage

Ø Assurer la formation des femmes para juristes  et les agents chargés d’appliquer la loi pour aider les femmes victimes d’esclavage

Ø Assurer une formation spécialisée pour les femmes victimes de l’esclavage

Ø Assurer un suivi des activités qui seront menées

Ø Eradiquer toutes les formes de l’esclavage en Mauritanie

Ø Lutter contre racisme et la discrimination basée sur la race, l’ethnie, la couleur de peau ou le sexe

3. Résultats attendus

Ø La loi est comprise de tous

Ø Des maisons d’accueil sont opérationnelles

Ø L’éducation citoyenne et civique assurée

Ø La formation des femmes para juristes assurés

Ø Assurer une formation spécialisée  des femmes victimes de l’esclavage pour répondre au marché du travail

Ø L’alphabétisation pour les victimes de l’esclave et leur insertion dans la vie active

Ø L’éradication des inégalités raciale et le renforcement de la cohésion sociale par l’équité entre les citoyens et le respect de leurs droits fondamentaux  

Ø Rapports d’évaluation élaborés

4. Description des activités

Les activités porteront essentiellement sur des activités susceptibles de faciliter la sensibilisation et la compréhension de la loi

ü Mener des campagnes de sensibilisation

ü Mener des séances de causeries

ü Projeter des films sur l’esclavage

ü Animer des émissions radiophoniques sur l’esprit de la loi

ü Organiser des sessions de  formation

ü Animer des débats télévisés

ü Faire du plaidoyer auprès des décideurs pour l’application de la loi

5.  Zones cibles

Les activités seront dans les régions suivantes : Hodh el Chargui , Hodh el Gharbi , Assaba , Guidimakha , Tiris Zemour , Dakhlet Nouadhibou et Trarza.

Le choix de ces régions  s’explique par le fait que c’est dans ces régions que l’esclavage sévit de manière permanente.

6. Groupes cibles/Bénéficiaires

Plus de 3000 personnes venues des régions cibles seront les bénéficiaires  directs des activités. Comme personnes associées nous aurons les chefs de tribus, les maîtres des esclaves, les imams. Autrement, toutes les personnes influentes capables de faciliter l’application de la loi et l’abandon de cette pratique inhumaine et dégradante pour l’être humain

7. Responsables des activités

Au niveau des régions cibles, L’association dispose d’antennes régionales chargées de la coordination de ses  activités. Chaque antenne régionale compte 11 à 15 femmes. Ainsi, pendant la réalisation des activités ces femmes seront impliquées dans les campagnes de  sensibilisation qui y seront menées sur le plan local.

8. Méthodologie

La méthodologie prévoit une approche participative basée sur des séances de causeries et de formation. Elles seront animées par des militants de droits humains dont les compétences sont reconnues en la matière.

Pendant les sessions de formation le POWER POINT et la projection de films seront utilisés pour faciliter la compréhension  du groupe cible. Les cours sur l’éducation citoyenne et civique seront dispensés dans les maisons d’accueil. Dans cette méthodologie des groupes de plaidoyer composés des organisations sœurs spécialisées dans la lutte contre l’esclavage seront mis sur place au niveau régionale accompagnés d’une large communication (débats télévisés, articles de presse et interview etc…..

9. Les Indicateurs de mesures d’impacts

- les changements de comportements et de mentalités

- sessions de formations organisées

- séances de causeries organisées

- taux de passage dans les maisons d’accueil

- Large communication autour de l’abandon de la pratique esclavagiste

- Des campagnes de plaidoyer réussies

10. Suivi et évaluation des activités du projet

Le suivi évaluation sera basé sur les indicateurs du projet .Des missions de terrain seront régulièrement organisées pour documenter la mise en œuvre des activités sur le terrain et faire le point des progrès réalisés en direction des produits et résultats prévus, identifier les difficultés rencontrées et les solutions envisagées. Des évaluations indépendantes pourront être entreprises par le partenaire, pour juger de l’impact du projet soumis par L’Association